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2.3 Les Abakuás et le spiritisme

Comme nous l'avons vu dans le chapitre1.3.16, les Ibo, Ibibio et Ijaw, peuples provennant du sud-est du Nigéria et du sud-ouest du Cameroun, connus sous le nom de Carabali (ou Brikamo) furent amenés du port de Calabar(capitale de l'etat du Cross River) à Cuba à partir de 1762. Les Efiks, sous-groupe des Ibibio amenèrenet avec eux, une société secrète qui parvint à survivre notamment dans les villes de La Havane et de matanzas. Cette société secrète, société Abakuá (ou Abakwá), joua un rôle très important dans la politique cubaine à partir de 1820, devant la montée de pouvoir des classes aisées. Ils sont les gardiens sévères du dialecte et du rituel "plante", "une sorte de franc-maçonnerie populaire" selon Alejo Carpentier. Ekué en langue Efik ou Ekoi (employée dans les cérémonies) signifie léopard. Ainsi, les Abakuas est la même organisation que celle connue sous le nom des "hommes léopards". Les Abakwas ne forment pas une religion mais une association fermée, exclusivement réservée aux hommes, initiés et liés par un serment. Ce sont les Ekobios ou Moninas. Contrairement aux cabildos yorubas, les Cabildos Carabalí de Cuba ne se superposent pas aux lieux de cultes abakuá, qui sont dans des endroits séparés, longtemps tenus secrets (car interdits à la fin du XIXe siècle).

Les Abakwas possèdent leur propres rythmes sacrés et utilisent le tambour Ekué (EkwéEkué), joué avec une fine baguette, produisant un song grave. C'est un tambour secret, gardé caché dans la Fambá (chambre sacrée). La voix magique sortant de ce tambour est alors interprétée par un Shaman.

Craints, car supposés sacrifier des blancs catholiques et pratiquer une sorcellerie malveillante, et en même temps objet de la risée générale en raison de leur côté "pittoresque", on les appelle Nañigos, petits frères. Il est vrai que la masse du public n'a que rarement l'occasion d'être confrontée avec leurs rites, sauf quand les Abakwas sortent en groupe dans la rue lors du carnaval de La Havane. Lors de ces évènenements les danceurs s'habillent en Diablitos ou Ireme (ou Idem, ndem) : danseurs masqués, dont les vêtements sont une abstraction de la peau de léopard avec, autour de la ceinture, une rangée de clochettes et sonnailles. Les Ireme qui sont en réalité les officiants du rituel, purifient par leurs danses et mouvements la route prise par le cortège. Le Moruá guide l'Ireme, en lui dictant les faits et gestes qu'il doit suivre. Les esprits imaginatifs tiennent à voir dans le bâton (Iton) un symbole phallique et dans la poignée de petites branches (Ifa), qu'ils tiennent dans les mains, l'héritage d'un lointain culte agraire de la fertilité. Dans l'est de l'île, deux cabildos existent toujours dans la ville de Santiago de Cuba, où ils jouent un rôle important dans le carnaval de la cité. A la Havane, il sont principalement regroupés dans le quartier de Guanabacoa. Le personnage Abakwa, Ireme, est quasiment devenu le symbole du folklore afro-cubain. La musique rythmique de la danse des Abkwas, associées aux traditions Bantoues a contribuée à l'ellaboration de la rumba, et plus précisément au Guaguanco.








Emmanuel Branlard